Dissolution ou départ ? Le 3e RG au cœur de la rumeur !
La rumeur du départ du 3e RG de Charleville-Mézières vient des déclarations faites en janvier à propos du Livre blanc en cours d’élaboration au ministère de la Défense sur la réorganisation de l’armée. Cependant, rien ne sera officiellement décidé avant la fin avril.
PHOTO (Archives Angel GARCIA) : Le 3e RG fait partie du paysage carolo et ardennais... depuis 1947. Depuis début janvier, la rumeur d’une menace de départ ou de dissolution du 3e Régiment de génie court en ville et dans le département d’une manière de plus en plus insistante. Certains rassurent, d’autres tendent le dos...
L’ORIGINE de la rumeur d’une possible dissolution du 3e RG vient des déclarations du ministre de la Défense, Hervé Morin, et du président de la République, Nicolas Sarkozy, à propos de l’élaboration en cours d’un « livre blanc » de la Défense qui déterminera les grandes lignes de la réorganisation de l’armée française souhaitée au plus haut niveau de l’État.
Le ministre envisage une réorganisation à deux niveaux.
Opérationnel, d’abord, pour rationaliser la géographie des implantations.
Sur le plan des conditions de vie des personnels, ensuite, notamment pour faciliter l’emploi des conjoints des militaires et la scolarisation de leurs enfants.
En 1996, le même genre de rumeur avait secoué le microcosme politique local, car, à l’époque, l’ordre du jour était (déjà) aux économies et il était question d’une possible concurrence entre le 13e régiment de génie d’Epernay et le 3e de Charleville-Mézières.
Aménagement du territoire
Dans un premier temps, les deux régiments avaient consolidé leurs spécialités (les blindés pour l’un et la mécanisation pour l’autre) et le conseil général s’était hâté d’assurer le maintien du « 3 » dans les Ardennes, en mettant à sa disposition un grand terrain de manœuvres à Hagnicourt.
Cependant, en 2003, le 13e RG pliait tout de même définitivement bagage pour le camp de Valdahon, dans le Doubs, au grand dam des élus sparnaciens ! Pendant ce temps-là, dans les Ardennes, tout le monde ne voyait dans cet épilogue que la conséquence d’une logique d’aménagement du territoire : les Ardennes en crise ne méritaient pas de perdre le 3e RG et avaient fait ce qu’il fallait pour le conserver.
En revanche, Epernay payait certainement l’exiguïté de l’enclavement de son régiment à l’intérieur de la ville.
Quoi qu’il en soit, le scénario qui se profile maintenant comporte une donnée plus inquiétante pour Charleville-Mézières, à savoir que «la Défense n’a plus vocation à participer à l’aménagement du territoire», dixit Nicolas Sarkozy.
Officieusement, on sait qu’il va falloir «rationaliser les moyens», éviter de «doublonner», «densifier les emprises» et... supprimer jusqu’à 30.000 postes sur 5 ans !
Pas avant fin avril
Les atouts ardennais pour maintenir le «3» dans les Ardennes ne seraient-ils plus des cartes maîtresses ?
Pas plus que la situation économique du département (taux de chômage, nombre de rmistes, etc.) ne serait susceptible d’écarter la menace d’une délocalisation du régiment ?
Si les conditions de vie des militaires et l’attrait de l’implantation régimentaire pour les gradés deviennent un critère réellement pris en compte, que penser alors de l’incitation financière de 9.000 euros annoncée par la ministre de l’Intérieur, en décembre, pour faire venir chaque cadre supérieur de l’Agence Nationale des Titres Sécurisés à Charleville-Mézières ? Est-ce un signe que les Ardennes n’attirent pas les cadres ?
Mais rien n’est décidé, affirme-t-on du côté de l’autorité militaire départementale. Les conclusions du «livre blanc» ne sont pas encore connues.
Elles ne le seront pas avant fin avril.
Après les élections municipales et cantonales...
Patrick Flaschgo
***
Le colonel Lecoeur : « Rien n'est établi»
« Aujourd'hui, le 3e RG représente 1.080 personnels (active réservistes et civils), soit 480 familles et 730 enfants scolarisés. Il ne fait l'objet d'aucune décision de délocalisation ou de dissolution », affirme le colonel Roland Lecoeur, chef de corps du 3e RG et délégué militaire départemental.
« Le plan annuel de mutation du personnel est conforme à ceux des années précédentes et les travaux d'investissement au sein du quartier en programmation pluriannuelle se poursuivent : les indications alarmistes sont donc infondées.
La réforme de la Défense étudiée actuellement a pour objectif, fixé par le Président de la République, de renforcer la dimension interarmées des capacités françaises et de mieux coordonner l'action interministérielle.
Un point d'étape a eu lieu le 3 janvier en présence du Président de la République qui a validé les premières propositions de la commission du livre blanc tout en demandant à ce que ses travaux soient approfondis... Les traductions législatives en matière militaire auront lieu d'ici l'été prochain. En conséquence, rien n'est établi. »
***
Bérengère Poletti : « Un non sujet ! »
Pour la députée UMP de la 1re circonscription, cette rumeur de délocalisation du 3e RG est « un non sujet ! ».
Bérengère Poletti déplore ce genre de rumeurs qui, à chaque fois, « desservent les Ardennes ».
Cela correspond « à des manœuvres politiciennes qui servent des intérêts électoraux ». Selon la parlementaire de la majorité présidentielle (et candidate à la mairie de Charleville-Mézières), « aucune liste noire » ne circule avec les noms des régiments condamnés. « Il y aura un arbitrage du Président de la République », précise-t-elle.
Réponse d'Hervé Morin
Bérengère Poletti a obtenu vendredi une réponse du ministre de la Défense qui confirme qu'il s'agit de « rumeurs sans fondement puisqu'aucune décision n'a été prise concernant les implantations militaires ».
Hervé Morin rappelle cependant que « dans le cadre d'un effort budgétaire, le Chef de l'État entend maintenir l'équipement et le format des armées autour de 2 % du PIB » (produit intérieur brut).
***
Claudine Ledoux : « Une épée de Damoclès »
« On sait que cette réforme est d'abord faite pour réduire les coûts ». Le maire de Charleville-Mézières, « sérieusement inquiète », en est persuadée.
Claudine Ledoux a écrit au ministre de la Défense pour lui demander une entrevue. « C'est une épée de Damoclès que nous avons au-dessus de la tête et nous avons le droit de savoir avant les élections municipales… L'état-major sait quels régiments seront dissous : la liste noire existe ! »
Le maire estime que le départ du 3e RG serait une « catastrophe économique » pour l'agglomération de Charleville-Mézières.
« Je me demande dans quelle mesure nous n'allons pas payer la future installation d'une base française à Abu Dhabi ! », dit-elle.
***
Philippe Vuilque : « Inacceptable ! »
Le député PS de la 2e circonscription, a, lui aussi, écrit à Hervé Morin. Philippe Vuilque adresse un courrier et une question orale au ministre de la Défense pour connaître la nature exacte des décisions qui seront prises et demande de toute urgence une entrevue.
« La disparition du 3e régiment du génie serait dramatique pour la ville et le département au plan économique et démographique. Les services, entreprises et commerces locaux seraient considérablement affaiblis par cette perte d'activité… Ce projet est inacceptable ! », ajoute le député socialiste, qui « appuie la démarche de Claudine Ledoux .
Journal l'Union du 4 février 2008